lundi 18 janvier 2010

DÉSASTRE EN HAÏTI : FAUT-IL VRAIMENT TOUT MONTRER ?

Après un désastre terrible comme celui du tremblement de terre en Haïti, c'est certain qu'un média d'information comme la télévision a le devoir de nous sensibiliser à l'urgence de faire notre part pour aider ces pauvres gens qui étaient déjà très pauvres et qui ont perdu le peu qu'elles avaient... Et on ne parle ici que des biens matériels que l'on pourra peut-être remplacer grâce à l'aide internationale. La perte d'êtres chers, elle, ne peut pas être comblée. Ce qui plonge les survivants dans le deuil et le désespoir. Dans le chaos qu'est devenu Port-au-Prince, tout le drame humain est exacerbé. Des actes d'héroïsme des sauveteurs, du total don de soi et de la charité la plus louable jusqu'aux bas actes de pillage, de violence, d'exploitation éhontée; tout y passe entre la grandeur humaine et ce que l'humanité a de plus honteux ou affreux. L'éternelle histoire de l'ange et de la bête, ou des deux côtés de la médaille...

Dans cet état où tout est sans dessus dessous, où la confusion règne partout, jusqu'à quel point les médias peuvent vraiment traquer la réalité et la vérité ? Alors que le ouï-dire est roi et les apparences peuvent être si trompeuses quand personne ne sait trop ce qui se passe... On voit donc sur nos écrans de télé, des reporters qui se promènent à travers les décombres et les victimes, ne sachant pas trop quoi dire mais insistant pour nous montrer la catastrophe sous tous les angles et la misère sous toutes ses coutures... Il faut bien faire un bon show comme s'il s'agissait d'un film d'horreur.

On connaît la formule à succès de la presse : les trois "S". "S" pour sports; "S" pour sexe; "S" pour sang. On pourrait ajouter : "S" pour scandale, et "S" pour sensations. En tout cas, ce qui compte surtout, peu importe le sujet, c'est d'avoir de bonnes images, des images qui frappent l'imagination. Des images comme celles de l'effondrement des tours du World Trade Center à New York que l'on n'a pas cessé de nous repasser en boucle. Peu importe que l'on ait des informations fiables, il faut faire un spectacle. Sans faire trop d'efforts pour faire comprendre. C'est superficiel, mais c'est payant car c'est vendeur.

Ainsi, en fin de semaine, était-il bien nécessaire de faire ce qu'a fait le journaliste Richard Latendresse, du Réseau TVA, c'est-à-dire suivre un camion rempli de cadavres de sinistrés haïtiens jusqu'à un dépotoir et de "l'admirer" déverser son macabre contenu à travers les ruines ou dans une fosse commune ? Ça ressemble à du "voyeurisme" de la pire espèce, du sensationalisme nécrophage... Un peu de retenu, de pudeur, de respect ne font jamais de tort. C'est bien connu, la modération a bien meilleur goût... Le contraire écoeure au plus haut point.

«Les médias tiennent leurs informations moitié des gens qui souhaitent faire dire du bien d'eux-mêmes, moitié de ceux qui voudraient faire dire du mal des autres.»
Philippe Bouvard.

«La télévision est un média finalement assez grossier, qui a toujours privilégié l'émotion.»
Christine Ockrent.

«Les médias donnent à voir, pas à réfléchir, encore moins à comprendre. L'image ment lorsqu'elle isole.»
Paul Lombard.